COORDONNER L’ACCOMPAGNEMENT | Les référentes sociales renforcent le vivre ensemble

11.12.2024 Anne Vallelian

Les référentes sociales de l’Association Althys jouent un rôle-clé dans le bon fonctionnement des logements adaptés avec accompagnement, comme en témoigne la résidence Oassis à Crissier, dans le canton de Vaud. Plus qu’une simple présence sur le terrain, elles sont le pilier du lien social et de l’accompagnement quotidien des locataires, souvent âgés.

Modernes, lumineux et fonctionnels, les lieux inspirent la quiétude et la sécurité. L’Association Althys, gère des logements pensés pour le bien-être et la mobilité des seniors et des personnes ayant besoin de soutien. Deux grandes salles communes avec des équipements de loisirs sont à disposition des locataires, donnant sur une cour intérieure arborée. Les locataires bénéficient également de nombreux services à proximité, comme une maison de santé et des commerces. Dans une des salles communes, un groupe d’une douzaine de locataires participe à une séance de gymnastique, animée avec enthousiasme par l’une des référentes sociales, qui clôt la leçon par un petit jogging en extérieur. Les locataires peuvent librement participer aux activités quotidiennes, sans obligation d’inscription. Althys gère une trentaine de résidences avec plus de 1500 locataires, principalement dans le canton de Vaud mais aussi à Neuchâtel et Fribourg.

Les logements adaptés avec accompagnement (LADA) sont des appartements indépendants formellement reconnus par la Direction générale de la cohésion sociale du canton de Vaud (DGCS) grâce à une convention. Ils sont conçus pour permettre aux seniors ou personnes en situation de handicap de vivre à domicile le plus longtemps possible. L’accessibilité des lieux, la sécurité des locataires, des systèmes d’alarme et d’appel à l’aide, un loyer abordable ou encore la mise à disposition d’espaces communautaires pour favoriser le lien social sont autant de prestations médico-sociales dispensées dans ce type de logement. «Toute personne à l’AVS ou à l’AI peut en bénéficier, précise Myriam Tellenbach, responsable opérationnelle Althys. Les locataires qui rentrent en appartement adapté avec accompagnement doivent être indépendants. C’est un critère primordial car aucune présence n’est assurée la nuit ou le weekend.»

Une profession en plein essor

La résidence Oassis s’appuie sur deux référentes sociales et un apprenti pour accompagner ses locataires dans un environnement où l’autonomie est essentielle. L’équipe assure un suivi personnalisé, organise des activités communautaires et apporte un soutien précieux face aux défis posés par les nouveaux outils numériques. «C’est un métier en plein développement, explique Myriam Tellenbach. Si la formation initiale peut être celle d’assistant socio-éducatif, elle n’est pas exclusive: nous accueillons des profils variés titulaires d’un diplôme HES, ES et même de masters en sociologie.» Valérie Hugentobler, professeure à la Haute école de travail social et de la santé de Lausanne (HETSL), confirme que les référentes sociales incarnent une nouvelle figure professionnelle dans l’accompagnement des seniors. C’est un métier majoritairement exercé par des femmes.

En plus des soirées à thème une fois par mois, les référentes sociales proposent des animations liées au maintien à domicile, comme des exercices de mémoire, de motricité et de prévention. De même, elles encouragent le contact extérieur en organisant des activités avec le quartier.epuis plusieurs années, la chercheuse s’intéresse aux questions en lien avec l’habitat et le vieillissement et travaille actuellement sur un projet de recherche financé par le Fonds national suisse (FNS). Son équipe a recensé divers établissements dans lesquels ces professionnelles sont à l’œuvre et a en effet observé des parcours très divers. «Il n’y a pas encore de formation spécifique, ce n’est pas un métier labellisé, confirme la professeure de la HETSL. Nous avons néanmoins remarqué que, dans 80 % des cas, ces personnes ont une expérience professionnelle en lien avec les personnes âgées en ayant travaillé soit dans des établissements médico-sociaux soit dans des organisations d’aide et de soins à domicile. Il existe toutefois des variations cantonales et selon le type d’employeur.»

Des activités pour tout le quartier

Bien qu’il n’existe pas encore de formation type, Valérie Hugentobler souligne que ces métiers exigent des compétences variées, un avis partagé par Myriam Tellenbach: «Une grande capacité d’organisation et une ouverture d’esprit sont nécessaires.» Le rôle de la référente sociale est multiple: elle doit en premier lieu avoir une vision systémique de son immeuble et être attentive à la présence ou l’absence des locataires. En plus de mettre en place des soirées à thèmes une fois par mois, elle propose des animations liées au maintien à domicile comme des exercices de mémoire, de motricité et de prévention. Les référentes sociales encouragent de même le contact extérieur en organisant des activités avec le quartier comme des tournois de pétanque, des matchs aux cartes ou une brocante annuelle. Comme les inscriptions se font souvent par QR codes, les référentes sociales assistent les locataires dans l’usage des outils numériques.

La référente sociale joue également un rôle essentiel lors de l’arrivée des locataires. Au moment de l’emménagement, un entretien permet de définir les besoins, les activités souhaitées et les modalités de contact. La référente peut-elle venir dans le logement? Ou, est-il préférable qu’elle appelle? «Nous ne sommes pas dans le contrôle. C’est au locataire de décider ce qu’il souhaite», détaille la responsable opérationnelle. «Chaque mois, la référente redéfinit les besoins des locataires et ajuste la situation si nécessaire.» C’est également au moment de l’entretien d’accueil que la question sécuritaire est abordée, par exemple en cas de chute. Un système d’appel d’urgence permet aux référentes, si elles sont présentes, d’intervenir avant d’appeler les proches ou la centrale d’urgence. Les logements adaptés avec accompagnement permettent des suivis très réactifs, notamment quand un locataire rentre de l’hôpital. «Il peut avoir son appareil d’urgence dans la journée et la référente sociale aura un point d’attention particulier. Selon le système d’urgence choisi lors de l’entretien d’accueil, une boîte à clé est installée afin de permettre toutes les interventions au domicile.»

Bien que les locataires jouissent d’une grande autonomie, cette indépendance ne signifie pas que les référentes sociales sont exemptes de défis. Elles doivent parfois appliquer des mesures de premiers secours en santé mentale. Et elles ne sont pas toujours formées pour aborder certaines situations délicates, comme les questions d’hygiène de certains locataires. Pour y faire face, des espaces de rencontre sont organisés chaque mois, permettant aux référentes d’échanger sur les problématiques qu’elles rencontrent. «Nous sommes très orientées solutions», souligne Myriam Tellenbach. En parallèle, le canton de Vaud propose des formations spécifiques, faisant de lui une région pionnière dans ce domaine. «Ces réunions, organisées deux fois par an, sont précieuses pour ces professionnelles, souvent seules dans leur fonction», ajoute Valérie Hugentobler.

Alors que le métier de référente sociale se développe dans des structures telles que les logements adaptés avec accompagnement, il apparaît comme une profession en plein devenir. Les recherches menées par l’équipe de Valérie Hugentobler mettent en lumière la diversité des parcours et des pratiques, et ouvrent la voie à une réflexion sur la création d’une formation spécifique. Dans un contexte où le vieillissement de la population et l’autonomie des seniors deviennent des enjeux majeurs, ce métier pourrait bien ­s’inscrire durablement dans le paysage des services d’accompagnement, nécessitant une structuration et une professionnalisation accrues.


 


Auteure: Anne Vallelian (ARTISET)
Photo: Darin Vanselow